« Changeons le regard que nous portons sur l’arbitre » : Rencontre avec Géraldine Rix-Lièvre

Que vit l’arbitre en plein match ? À travers ses travaux de recherche, Géraldine Rix-Lièvre, professeure des universités en Science et Technique des Activités Physiques et Sportives (STAPS) et chercheure au laboratoire Activité, Connaissance, Transmission, éducation (ACTé) de l’Université Clermont Auvergne, nous donne des éléments de réponse. Être au bon endroit au bon moment, prendre des décisions, bien communiquer avec les joueur·euse·s et satisfaire les attentes diverses autour d’un match… L’arbitre est indispensable, son rôle est complexe. Et pour faire découvrir ce métier au grand public, la chercheure et son équipe proposent de se mettre à la place de l’arbitre à travers une animation immersive à Paris au moment des Jeux Paralympiques du 28 août au 8 septembre.

Les arbitres vont être sur le devant de la scène lors des Jeux Olympiques et Paralympiques et leurs décisions seront plus que jamais attendues…

G.R-L. : Leurs décisions seront même scrutées… On attend aussi de l’arbitre une véritable performance ! Et une performance c’est à la fois la production de quelqu’un mais aussi le jugement social que l’on porte sur cette dernière. L’arbitre est ainsi confronté·e aux attentes des entraineur·euse·s, de sa hiérarchie, des sportif·ve·s sur le terrain ainsi qu’à ses propres attentes sur ce qu’il ou elle considère comme une « performance ». Il ou elle doit composer avec toutes ces attentes qui sont rarement identiques et souvent sources de tensions. Un·e arbitre de rugby doit à la fois mettre de l’ordre, comme par exemple prendre le temps de veiller à ce qu’une mêlée soit structurée, mais doit également faire en sorte que le jeu se mette vite en place et qu’il y ait du spectacle… Finalement, l’arbitre doit accompagner le jeu, ne pas laisser passer ce qui est inacceptable mais ne pas trop siffler non plus !

Comment sont formé·e·s les arbitres d’aujourd’hui ?

G.R-L. : Chaque fédération sportive propose sa propre formation en fonction du sport concerné. Et c’est assez logique car finalement, l’arbitre, au moment du match, c’est la personne représentant la fédération qui montre et impose aux joueur·euse·s ce qui est possible : le « qu’est-ce qu’on peut faire ensemble ». Historiquement, les fédérations apprenaient essentiellement aux arbitres à connaître et savoir restituer les règles. Aujourd’hui, l’outil vidéo est très utilisé pour apprendre à juger dans divers contextes de jeu. Dans certains sports, comme le football ou le rugby, les arbitres s’entrainent énormément sur le plan physique.

De plus en plus de fédérations intègrent les questions de préparation mentale, de nutrition, de sommeil, de communication avec les médias comme des secteurs importants pour la formation. Côté université, je travaille avec plusieurs collègues au sein du « PERF arbitrage » qui est le Pôle d’Expertise de Recherche et de Formation dédié à l’arbitrage sportif que l’Université Clermont Auvergne (UCA) porte avec la Fédération Française de Football (FFF) et de Rugby (FFR). Nous menons des recherches pour le développement de l’arbitrage sur lesquelles s’appuient des formations universitaires et diplômantes offertes aux arbitres. Ces dernières prennent en compte les compétences transversales communes que doivent développer l’ensemble des arbitres quel que soit le sport dans lequel il ou elle évolue. On travaille par exemple tout ce qui concerne une bonne communication et facilite l’interaction avec les joueur·euse·s. Finalement un arbitre de rugby peut apprendre beaucoup de ce que fait un arbitre de football et inversement ! Enfin, le PERF arbitrage est aussi un vecteur de valorisation scientifique pour faire découvrir le métier d’arbitre au grand public.

Cette volonté de rendre accessible le savoir scientifique autour de l’arbitrage vous a également amenée à créer une animation grand public le temps des jeux Paralympiques de Paris…

G.R-L. : Juste à côté du club de France, lieu de célébration des futur·e·s médaillé·e·s dans le parc de La Villette à Paris, il y aura un espace de valorisation de la recherche autour du sport et de l’activité physique à destination du grand public. C’est le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche qui a contacté des universités françaises dont l’UCA pour préparer des animations ludiques en lien avec les recherches actuelles. Nous proposons aux visiteur·euse·s de se mettre à la place de l’arbitre au cœur d’un match de foot ou de rugby grâce à une vidéo 360°. Comment se placer et se déplacer sur le terrain ? Que privilégier pour prendre une décision sachant qu’on ne voit pas tout ? Nous souhaitons montrer au public que l’arbitrage va bien au-delà de la connaissance et de l’application de règles !